De tradition, de rivalités et d’arts…
Critique express’ de « Mémoires d’une geisha »
Un film dont j’avais entendu parlé… et pas qu’en bien, largement pas. Mais bon, printemps du cinéma oblige, long temps sans ciné aidant… Mais comme dirait Stefan Eicher : « t’as encore déconné, ni remords ni regrets ».
Fiche technique :
-Réalisateur : Rob Marshall
Acteurs :
-Zhang Ziyi (Sayuri)
-Michelle Yeoh (Maméha)
-Gong Li (Hastumomo)
-Ken Watanabe (Le président)
-Suzuka Ohgo (Chiyo)
Compositeur : John Williams
D’après l’œuvre de : Arthur Golden
L’histoire :
-Les cinq premières minutes :
Tout commence un jour de pluie, dans une petite hutte de pêcheur au Japon. Nous sommes quelques années avant le début de la seconde guerre mondiale, Chiyo et sa sœur son arrachées à leur famille pauvre, transportées plus ou moins comme du bétail pour être vendues à des maisons de geishas. Séparée de sa sœur, Chiyo va apprendre à servir sous la menace de la trique de « mère » et de la méchanceté de Hatsumomo, geisha aussi célèbre que fourbe que ne garde « mère » que parce qu’elle est une gagneuse hors pair. La preuve en est de son exploit : à 20 ans elle avait déjà remboursé la totalité de ce qu’avait coûté son enseignement. Le seul avenir possible pour Chiyo : servir suffisamment bien pour être envoyée à l’école des geishas et devenir quelqu’un. Sa seule envie : fuir pour retrouver sa sœur.
« Mère », impitoyable mais pas injuste
-Un peu plus loin :
A peine rentrée à l’école des geishas, Chiyo s’en fait renvoyer pour avoir détruit le plus beau kimono de Maméha, la plus grande de toutes les geishas et rivale éternelle de Hatsumomo. Mais pour avoir réalisé la besogne de Hatsumomo, celle-ci lui permet de retrouver sa sœur. Malheureusement lorsque Chiyo rate sa seule occasion de fuir avec elle, elle se retrouve condamnée à rester pour toute sa vie la servante des geishas de la maison. Pourtant, un jour, alors qu’elle n’a que 14 ans, elle fait la connaissance d’un homme qui lui offre une glace et lui redonne courage en elle-même. Fascinée par les geishas qui l’accompagnent, Chiyo se jure de devenir geisha pour être un jour proche de celui dont elle est subitement tombée amoureuse. Et le destin vient à son secours sous la forme improbable de Maméha qui offre de prendre Chiyo sous son aile. Elle propose à « mère » le pari suivant : en six mois seulement, elle fera de Chiyo une geisha accomplie qui aura remboursé l’intégralité de sa dette envers sa maison. Si elle y parvient, « mère » perd ses droits sur les gains à venir de la petite.
C’est donc avec un maître à nulle autre pareille que Chiyo entre enfin dans le monde dont elle rêve. Retournant à l’école elle apprend les arts raffinés et variés qui font des geishas des joyaux : chant, danse, musique, conversation, cérémonie du thé … Sous la tutelle de Maméha, elle devient vite connue et reconnue sous le nom de « Sayuri » jusqu’à gagner le pari et devenir l’héritière de la maison de « mère ».
Cependant, alors qu’elle est en passe de devenir une légende, la guerre arrive au Japon. Tout le monde est obligé de se séparer et Chiyo vit son exil à la campagne d’autant plus mal que son amour secret, « le président » est un vieil ami de Maméha qu’elle pouvait à présent souvent voir même si Maméha destinait Sayuri à l’associé de celui-ci : Nobu.
Mais lorsque la guerre s’éteint, lorsqu’il ne reste plus rien des mystères de geishas, Nobu vient trouver Sayuri pour lui demander l’aide de la plus grande des geishas de son temps. Elle devra « charmer » des américains afin de conclure un contrat qui pourrait relancer ses affaires… et celles du président. De retour à sa maison de geishas, Sayuri découvrira que si les mystères des geishas ont disparu, leurs tourments, eux, sont plus que jamais réels… en particulier pour une geisha amoureuse.
Hatsumomo en pleine coercition
La musique :
Je dois dire que si la musique est très jolie et bien réussie, elle ne présente pas à mon avis beaucoup d’intérêt en elle-même. Pas le genre de BO que j’écouterais pour l’écouter… à part peut-être certains morceaux chantés très bons.
Mais (et au fond le contraire aurait été étonnant) celle-ci est tout à fait adaptée au film. L’ambiance passe tout à fait au spectateur. Que ce soit les coups de pinceaux qui défigurent le kimono de Maméha qui se répercutent dans toute la salle sous la forme de stridences crispantes ou la peur de Chiyo sur le point de se faire prendre pour son forfait qui pulse aux oreilles du public, il y a des moments très bons et qui m’ont marqués (et pourtant c’est rare !)
Sayuri et Maméha : « une geisha doit pouvoir arrêter un homme d’un regard »
Les acteurs :
Dans l’ensemble les acteurs sont bons à très bon. Evidemment, on n’a pas un casting de derrière les fagots.
Mais ce ne sont pas que des premiers rôles que je vise avec ce compliment. « Mère » est admirable, toute en suspicion, intransigeance et calcul. Avec son regard aiguisé et son fume-cigarette utilisé avec une grande habileté j’ai trouvé. Le rôle de Hatsumomo était à mon avis plus aisé et si Gong Li aurait pu faire mieux, elle n’en reste pas moins détestable et hautaine à souhait. Nobu, à mi chemin entre emportement et calme olympien donne un mélange très convaincant mais peut-être la cicatrice y est-elle pour beaucoup ? Peu importe, le résultat est là !
Dommage par contre, pour un personnage de son importance, j’ai trouvé « le président » assez terne. Peut-être c’est cela qu’aime Sayuri en lui mais je n’ais pas accroché… La même chose aurait pu être dite de l’amie de Sayuri (dont je ne saurais pas écrire le nom) mais au final c’est le personnage en lui-même qui est terne. Et l’actrice rend une si franche rupture entre l’avant et l’après-guerre que l’on en viendrait presque à l’apprécier pour cela.
Et enfin bien sûr le duo de tête : Zhang Ziyi et Michelle Yeoh. Bien que je sois parti pris par avance pour Michelle Yeoh, je ne peux que reconnaître la très belle prestation de la cadette. Bien sûr Sayuri n’est pas un personnage simple et il ne doit pas être simple à jouer. Et pourtant le tout est crédible de bout en bout : dans le calme, les pleurs, la joie ou la douleur contenue… Elle confirme ici que ses rôles ne sont pas usurpés même si elle est en fait éclipsée par Michelle, bien entendu.
Parce que c’est une Maméha impériale comme le veulent son rang, sa célébrité et sa classe qui nous est donnée, on ne peut que s’incliner. On pourrait penser que le rôle est plus simple puisque le personnage n’est pas aussi complexe que Sayuri mais je pense que le fait que Maméha soit tout en retenue, que ses pleurs ne soient que des yeux pleins de larmes, que ses joies ne sont que des sourires en coin, que ses numéros de charme se contentent d’un regard… tout cela donne un personnage bien intériorisé et… enfin bref, j’ai beaucoup aimé le personnage et encore plus le visage que lui a donné Michelle Yeoh !
Maméha, la plus grande des geishas
Les petits hics :
Hé oui, même si je n’en ais dit à peu de choses près que du bien jusqu’à présent, ce film ne contient pas que de trésors… loin de là…
Déjà, j’ai vu le film en VF et j’ai trouvé que cela manquait par moments de traduction. Par exemple, au début rien n’est traduit. Bon, j’avoue que là ça ne gène pas du tout la compréhension de l’histoire. Mais il y a aussi des petits mots par moments. Moi, cela ne m’a pas gêné parce que à force de mangas, d’animes et autres on finit par avoir des bases basiques qui suffisent mais je me suis dit « les gens qui n’y captent rien… ça les gène ? » et au final je pense que par moments oui.
En plus de cela, ça manque peut-être d’explication ou d’utilisation de vocabulaire qui traduirait mieux les propos en japonais. Que ce soit les suffixes en « san », « chan » et autres, les « sakura » … là aussi je pense que pour les gens qui n’y connaissent rien c’est perdre des nuances…
Sinon, je n’ais pas vraiment aimé le tournant que prend le film avec l’arrivée de la guerre. Bon, évidemment là je m’attaque au scénario même du film mais c’est vrai : à mon avis c’était plus intéressant de voir le monde des geishas, ses rites, ses coutumes ainsi que son insertion dans le monde moderne qu’était devenu le Japon. Le thème est un peu banal de la coexistence de la tradition et du modernisme mais vu sous l’angle des geishas je trouvais cela très intéressant. Privilégier ce que j’ai perçu comme un côté mélodramatique est un mauvais choix selon moi…
Et enfin, comme toujours, je n’ais pas aimé la fin du film mais je pense que vous deviez vous en doutiez à force (surtout quand j’annonce que j’ais pas aimé la trame du scénario…).
La danse qui propulsera Sayuri au rang de légende vivante
Pour conclure :
Un film plaisant et qui se laisse regarder malgré l’arrivée de la guerre… on avait déjà assez à faire avant. Un bon casting qui met les personnages en valeur. Une bonne musique qui met l’ambiance en valeur. Des scènes très belles visuellement et des jolies trouvailles à l’écran pour obtenir un film très esthétique… jusqu’à l’arrivée de la guerre une fois de plus. Le film a pour lui l’aspect didactique pour éclairer mieux sur les geishas qui sont de nos jours très mal estimées.
N’allez pas le voir au cinéma, en plus il serait dans une petite salle. Faites-le-vous prêter en DVD quand il sortira, c’est suffisant. Et alors peut-être direz-vous que tous les aspect post-guerre que je n’ais pas aimé sont un très bon moyen pour montrer les changements profonds du Japon à l’époque, en particulier la mort des mythes et des mystères… ceux des geishas n’y faisant pas exception (parce que au final c’est tout à fait ça…).